Mercredi 29 juin 2016
Sjøvegan – Narvik – Tranøy Fyr
Le début de la journée s’annonça sous les auspices les plus hydrologiques qu’il soit. Nous dûmes enfiler nos impers pour aller prendre le petit déjeuner, mais ce n’était qu’un apéritif.
Lorsque nous chargeâmes nos mules, le ciel avait une crise diurétique aigüe, comme s’il avait éclusé toutes les cuves d’Inbev pendant la nuit.
C’est le genre de départ dont les gnous raffolent : avant même d’être partis, ils ont l’impression d’être arrivés : la pluie a déjà trouvé son chemin vers les bagages, les tank bags, les gants et les nuques.
N’écoutant que son immense courage et son infini dévouement à la petite troupe dont il avait la garde et la responsabilité, notre chef attaqua l’asphalte détrempée avec détermination. Les gnous suivirent dans un ordre presqu’inamovible ; Milougnou vint en deuxième place, Charmingnou en troisième, Mc Gnou en antépénultième, Finougnou fermant la marche.
Pour autant que l’on fasse abstraction des roues qui giclaient et de l’élément aqueux qui s’infiltrait peu à peu dans les dessous de nos dessous en faisant fi des protections imperméables dont nous nous étions munis, tout se passa pour le mieux. Lorsque nous nous élançâmes vers un col de basse altitude, nous déchantâmes aussitôt : nous atteignîmes le plafond de la nébulosité et pénétrâmes dans un épais brouillard qui donna à chaque gnou l’impression qu’il était seul au monde. La grégarité endémique des gnous n’est plus à démontrer : lorsqu’ils ne se voient plus, ceux qui ne paniquent pas dépriment aussitôt. Il y eut immédiatement un mouvement spontané de resserrement des rangs, jusqu’à ce que chacun ait au moins un congénère en vue. Aucun événement funeste ne fût à déplorer.
A la première accalmie, nous fîmes une courte halte, ignorant la volonté de Papa Gnou de pousser toujours un peu plus loin. Il finit par nous rejoindre, alléché par les barres Lion achetées la veille et qui avaient été mises à l’abri pour lui éviter une indigestion. Il avait en effet élevé cette friandise au rang d’apothéose de la gastronomie norvégienne en ajoutant sentencieusement que le fabricant les produisait plus vite qu’il n’arrivait à les dévorer. C’est vraisemblablement pour cette raison, qu’une fois traversée Narvik, il s’arrêta à hauteur d’une supérette qui semblait largement fournie en Lion. Ce carnassier africain était loin de penser qu’un gnou puisse un jour devenir son principal prédateur.
Les gnous commandèrent un léger viatique qui suffit à peine à calmer leurs douleurs d’estomac, puis pris d’un accès de gourmandise, Finougnou et Papa Gnou commandèrent comme dessert un dôme de massepain vert fourré d’une concoction proprement innommable. Un autre carnassier fit instantanément les frais de cet impair gastronomique, ce qui causa un léger assoupissement de notre chef incontesté.
Lorsqu’il eût recouvré ses esprits, la route fût reprise. Alors que nous nous rangions pour prendre un ferry, quelle ne fut pas notre stupéfaction de voir arriver une espèce de croisement entre un renard et un coyote. L’animal n’était nullement farouche et semblait même apprécier la compagnie des camions, voitures et motos qui attendaient patiemment l’arrivée du bac. Était-il enragé ou quémandait-il simplement quelque nourriture ? Nous décidâmes de ne pas nous approcher afin d’éviter une morsure aussi douloureuse qu’inutile.
Le ciel s’étant sensiblement éclairci, nous pûmes accélérer l’allure ce qui fit naître un grand sourire dans le casque de notre tête de colonne.
Notre avant-dernier arrêt fût au centre Knut Hamsun dont l’architecte était Steven Holl. Le bâtiment en lui-même est plus impressionnant que la personne à qui il est dédié. Knut Hamsun était un poète pronazi qui fut poursuivi pour trahison devant les tribunaux de son pays. Il avait poussé le vice à faire cadeau à Goebbels de sa médaille de prix Nobel reçu avant la guerre.
Avisant un petit phare rouge et blanc le long de la route, nous fîmes un ultime arrêt ou Mc Gnou collecta quelques palourdes et bulots tandis que les gnous partageaient des souvenirs mémorables.
Mc Gnou se mit en tête de faire un selfie des gnous en haut du phare. Plusieurs tentatives infructueuses l’amenèrent à escalader l’échelle en courant à de nombreuses reprises, ce qui l’essouffla totalement. C’est tout juste s’il trouva la force de sourire à l’instant fatidique.
En arrivant au bout de notre route nous découvrîmes un lieu magique qui nous enchanta aussitôt : il s’agissait d’un phare entouré de quelques maisons d’hôte ou nous allions loger.
Le lieu porte le doux nom de Tranøy Fyr. Nous garâmes nos motos sur le parking et prîmes la longue coursive qui menait au site, couverts de nos bagages démontés de nos fidèles mécaniques.
Mc Gnou eût ensuite l’idée de proposer à Papa Gnou un remake du célèbre film « les oiseaux » de Hitchkock. Un couple d’eiders (Aervugler) protégeait en effet sa progéniture en attaquant tout intrus, avec griffes et bec. Les gnous apprécièrent beaucoup plus l’intermède que les eiders qui s’offrirent quelques lampées d’adrénaline bien tassées.
Avisant un peu plus tard un panneau avec une inscription en norvégien, ils demandèrent à une jolie autochtone ce que cela signifiait. Elle répondit que le sens approximatif était : « La loi punit les dénicheurs et ceux qui perturbent la tranquillité des oiseaux. » Nous étions heureux de n’avoir rencontré aucune loi pendant notre méfait.
Alors que les gnous allaient se coucher, Mc Gnou prit son habituel plaisir à coucher sa prose sur le clavier de son laptop, rêvant aux photos du soleil de minuit qu’il allait pouvoir prendre.
Lorsque nous chargeâmes nos mules, le ciel avait une crise diurétique aigüe, comme s’il avait éclusé toutes les cuves d’Inbev pendant la nuit.
C’est le genre de départ dont les gnous raffolent : avant même d’être partis, ils ont l’impression d’être arrivés : la pluie a déjà trouvé son chemin vers les bagages, les tank bags, les gants et les nuques.
N’écoutant que son immense courage et son infini dévouement à la petite troupe dont il avait la garde et la responsabilité, notre chef attaqua l’asphalte détrempée avec détermination. Les gnous suivirent dans un ordre presqu’inamovible ; Milougnou vint en deuxième place, Charmingnou en troisième, Mc Gnou en antépénultième, Finougnou fermant la marche.
Pour autant que l’on fasse abstraction des roues qui giclaient et de l’élément aqueux qui s’infiltrait peu à peu dans les dessous de nos dessous en faisant fi des protections imperméables dont nous nous étions munis, tout se passa pour le mieux. Lorsque nous nous élançâmes vers un col de basse altitude, nous déchantâmes aussitôt : nous atteignîmes le plafond de la nébulosité et pénétrâmes dans un épais brouillard qui donna à chaque gnou l’impression qu’il était seul au monde. La grégarité endémique des gnous n’est plus à démontrer : lorsqu’ils ne se voient plus, ceux qui ne paniquent pas dépriment aussitôt. Il y eut immédiatement un mouvement spontané de resserrement des rangs, jusqu’à ce que chacun ait au moins un congénère en vue. Aucun événement funeste ne fût à déplorer.
A la première accalmie, nous fîmes une courte halte, ignorant la volonté de Papa Gnou de pousser toujours un peu plus loin. Il finit par nous rejoindre, alléché par les barres Lion achetées la veille et qui avaient été mises à l’abri pour lui éviter une indigestion. Il avait en effet élevé cette friandise au rang d’apothéose de la gastronomie norvégienne en ajoutant sentencieusement que le fabricant les produisait plus vite qu’il n’arrivait à les dévorer. C’est vraisemblablement pour cette raison, qu’une fois traversée Narvik, il s’arrêta à hauteur d’une supérette qui semblait largement fournie en Lion. Ce carnassier africain était loin de penser qu’un gnou puisse un jour devenir son principal prédateur.
Les gnous commandèrent un léger viatique qui suffit à peine à calmer leurs douleurs d’estomac, puis pris d’un accès de gourmandise, Finougnou et Papa Gnou commandèrent comme dessert un dôme de massepain vert fourré d’une concoction proprement innommable. Un autre carnassier fit instantanément les frais de cet impair gastronomique, ce qui causa un léger assoupissement de notre chef incontesté.
Lorsqu’il eût recouvré ses esprits, la route fût reprise. Alors que nous nous rangions pour prendre un ferry, quelle ne fut pas notre stupéfaction de voir arriver une espèce de croisement entre un renard et un coyote. L’animal n’était nullement farouche et semblait même apprécier la compagnie des camions, voitures et motos qui attendaient patiemment l’arrivée du bac. Était-il enragé ou quémandait-il simplement quelque nourriture ? Nous décidâmes de ne pas nous approcher afin d’éviter une morsure aussi douloureuse qu’inutile.
Le ciel s’étant sensiblement éclairci, nous pûmes accélérer l’allure ce qui fit naître un grand sourire dans le casque de notre tête de colonne.
Notre avant-dernier arrêt fût au centre Knut Hamsun dont l’architecte était Steven Holl. Le bâtiment en lui-même est plus impressionnant que la personne à qui il est dédié. Knut Hamsun était un poète pronazi qui fut poursuivi pour trahison devant les tribunaux de son pays. Il avait poussé le vice à faire cadeau à Goebbels de sa médaille de prix Nobel reçu avant la guerre.
Avisant un petit phare rouge et blanc le long de la route, nous fîmes un ultime arrêt ou Mc Gnou collecta quelques palourdes et bulots tandis que les gnous partageaient des souvenirs mémorables.
Mc Gnou se mit en tête de faire un selfie des gnous en haut du phare. Plusieurs tentatives infructueuses l’amenèrent à escalader l’échelle en courant à de nombreuses reprises, ce qui l’essouffla totalement. C’est tout juste s’il trouva la force de sourire à l’instant fatidique.
En arrivant au bout de notre route nous découvrîmes un lieu magique qui nous enchanta aussitôt : il s’agissait d’un phare entouré de quelques maisons d’hôte ou nous allions loger.
Le lieu porte le doux nom de Tranøy Fyr. Nous garâmes nos motos sur le parking et prîmes la longue coursive qui menait au site, couverts de nos bagages démontés de nos fidèles mécaniques.
Mc Gnou eût ensuite l’idée de proposer à Papa Gnou un remake du célèbre film « les oiseaux » de Hitchkock. Un couple d’eiders (Aervugler) protégeait en effet sa progéniture en attaquant tout intrus, avec griffes et bec. Les gnous apprécièrent beaucoup plus l’intermède que les eiders qui s’offrirent quelques lampées d’adrénaline bien tassées.
Avisant un peu plus tard un panneau avec une inscription en norvégien, ils demandèrent à une jolie autochtone ce que cela signifiait. Elle répondit que le sens approximatif était : « La loi punit les dénicheurs et ceux qui perturbent la tranquillité des oiseaux. » Nous étions heureux de n’avoir rencontré aucune loi pendant notre méfait.
Alors que les gnous allaient se coucher, Mc Gnou prit son habituel plaisir à coucher sa prose sur le clavier de son laptop, rêvant aux photos du soleil de minuit qu’il allait pouvoir prendre.